Kant dans l'agora d'Athènes. Éléments de la pensée grecque dans la Dissertation de 1770

lorini
2022-01-01

2022
978-2-7116-3055-4
Kant
Platon
pensée grecque
monde sensible
monde intelligible
Notre contribution a pour but de montrer que dans la Dissertatio de 1770 Kant se mesure avec la pensée des anciens – surtout la pensée grecque – sur des questions qui deviendront très importantes dans la gestation tourmentée du criticisme. Dans le § 3 de la Dissertatio, Kant affirme que « dans les écoles des anciens », le terme phénomène désigne l’objet de la sensibilité, tandis que ce qui ne contient « rien à l’exclusion de ce qui doit être connu au moyen de l’intelligence » est défini noumène (voir AA 02 : 392). La question de la précision et profondeur de la connaissance qu’avait Kant de la pensée grecque est depuis longtemps un objet de débat et la discussion concernant les textes qui ont filtré le contact de Kant avec le monde grecque est toujours ouverte. Dans le cas de Platon, par exemple, certains chercheurs soutiennent que la source principale de Kant serait l’Historia critica philosophiae de Johann Jacob Brucker, que Kant mentionne dans la KrV à propos justement de Platon (A 316/B 372), alors que d’autres indiquent plutôt le Phaedon oder über die Unsterblichkeit der Seele : in drey Gesprachen de Moses Mendelssohn. Quoi qu’il en soit, il est important de souligner que la Dissertatio témoigne d’une extension des références de Kant aux philosophes grecs, puisque dans les écrits précédents du philosophe les références principales au monde ancien sont représentées par Sénèque et Lucrèce (voir par ex. Gedanken AA 01 : 7 et Beweisgrund AA 02 : 65). Les renvois – plus ou moins orthodoxes et directs – de Kant à la classicité grecque dans la Dissertatio de 1770 correspondent à l’identification par Kant de questions qui sont centrales dans le développement critique ultérieur de sa pensée, comme par exemple celle de la distinction entre le phénomène et le noumène, à laquelle est liée aussi la question de la nature problématique et ambiguë des intellectualia, à savoir les objets appartenant au mundus intelligibilis. Ce n’est pas par hasard, donc, si le terme intellectualia apparaît avec une certaine fréquence – à la fois dans des Reflexionen contemporaines de la Dissertatio (e.g. 4446, 4449, 4451, AA 17 : 553-556) et dans des cours de la période critique (e.g. Metaphysik Volckmann, AA 28: 370-371; Metaphysik Dohna, AA 28: 619; Metaphysik L1, AA 28: 175) – dans des passages où il est question des philosophes anciens (Aristote, Platon et Pythagore).
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